Il y a deux ans, nous avons commencé une recherche ayant pour objet « Le miracle ». Son point de départ était de chercher à comprendre ce que ce mot signifie, le sens qu’il charrie, l’imaginaire qu’il porte en lui, pouvait bien vouloir dire aujourd’hui. Quelle pouvait être son acception commune.
Nous sommes donc allés interviewer des personnes (rencontrées dans la rue, en prenant des rendez-vous, dans une prison, une école, une maison de retraite, des prêtres et un évêque aussi, etc…) pour tenter de comprendre ce qu’un miracle pouvait bien être, d’un point de vue intime, ultra-subjectif. Ces rencontres ont été à la fois notre porte d’entrée dans ce sujet et aussi la matière première pour l’écriture musicale de La Symphonie tombée du ciel. Première forme que nous avons créé autour de cette question. La deuxième forme est un opéra qui s’appelle Les Incrédules, avec un grand orchestre en fosse, un plus petit sur scène, des actrices et chanteuses et chanteurs.
Avec cette troisième forme nous allons continuer à fouiller cette question, mais avec les moyens théâtre musical, une sorte de micro opéra pour des actrices et des acteurs, où la voix parlée sera le moteur de la composition musicale. Un opéra non-lyrique. Au plus proche du rythme de la pensée et de l’action. Nous allons fondre l’écriture de plateau et une plus classique, celle d’un texte et d’une partition.
Ce qu’on peut entendre par « opéra pour acteur.ices » c’est un récit où le jeu, la parole des acteur.ices se construit musicalement, où cette parole est orchestrée, comme la voix d’un chanteur ou d’une chanteuse d’un point de vue tonal et rythmique. La voix parlée produit aussi une mélodie (c’est à dire une suite de notes organisées rythmiquement), certes bien souvent plus aride qu’un chant à proprement parler mais pas moins poétique et architecturée. C’est à partir de ces voix que l’écriture orchestrale se construit, que la composition se déploie. Ce que nous venons chercher avec cette forme, c’est tout ce qui se passe sous les mots, ce qu’ils disent sans que ce soit entendu. La musique agit comme une sorte de porte-voix. Mais aussi comme un contrepoint: elle ne vient pas seulement amplifier la parole, mais aussi en diffracter le sens, et en déployer le son de ce qui est dit.
Nous allons travailler pour cette création avec un quatuor à cordes. Bien qu’étant un ensemble réduit, il offre un son large et plein autant que la précision et la douceur nécessaires à laisser passer les voix parlées. En réalité il s’agira d’un quatuor augmenté du miraclophone. Pour Les Incrédules, Thibault Perriard a conçu un instrument à balanciers suspendus à un grand cadre qui viennent pincer des cordes et produit des séquences mélodiques et rythmiques aléatoires. Cet instrument à balanciers se joue aussi avec un ou des archets, aussi bien qu’avec des baguettes, un peu comme un cymbalum, ou encore en pizzicati. Ce quintet sera adjoint d’instruments à hanche (sax, clarinette, clarinette basse).
C’est un ensemble qui, pour la tentative que nous voulons mener, celle d’une sorte d’opéra, nous permet de « faire croire », de faire semblant que nous sommes cinquante.
Samuel Achache et Florent Hubert
Juillet 2025